AVIS : UNE ORDONNANCE DE NON PUBLICATION A ÉTÉ PRONONCÉE AU PROCÈS ET DEMEURE EN VIGUEUR
Vera Camacho c. R., 2021 QCCA 683
En principe les crimes constituants des transactions criminelles distinctes entraînent, sous réserve du principe de la totalité, des peines consécutives.
Il en découle que « [l]orsque les infractions sont commises à différents moments contre différentes victimes, les peines seront généralement consécutives. ».
[24] Je suis d’accord que le libellé de l’alinéa 718.3(7)b) du Code criminel oblige le juge à imposer des peines consécutives dans les cas qui y sont mentionnés. Dans au moins deux arrêts, on a conclu au caractère obligatoire de cette disposition : R. c. Montour, 2020 QCCA 1648, par. 74; R. c. Clarke, 2021 NLCA 8, par. 71; voir aussi R. c. Rayo, 2018 QCCA 824, par. 132. Cela n’est pas véritablement litigieux.
[25] Il n’est pas contesté non plus qu’un juge dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour imposer des peines concurrentes ou consécutives. Dans l’arrêt Guerrero-Silva, la Cour rappelait que « [b]ien que la décision d’ordonner des peines concurrentes ou consécutives relève de la discrétion du juge, il demeure qu’en principe les crimes constituants des transactions criminelles distinctes entraînent, sous réserve du principe de la totalité, des peines consécutives. » : R. c. Guerrero Silva, 2015 QCCA 1334, par. 59; R. c. Muongholvilay, 2016 QCCA 232, par. 21; R. c. Desjardins, 2017 QCCA 196. Il en découle que « [l]orsque les infractions sont commises à différents moments contre différentes victimes, les peines seront généralement consécutives. » R. c. Kubala, 2017 QCCA 882, par. 13.
[26] Ainsi, les tribunaux ont toujours été conscients que la perpétration de plusieurs crimes distincts entraîne généralement, mais pas obligatoirement, des peines consécutives. Le principe de la proportionnalité est toujours primordial dans l’exercice de leur discrétion.
[27] Comme le rappelait la Cour suprême, « la décision d’infliger des peines concurrentes ou des peines consécutives devrait être traitée avec la même retenue que celle dont les cours d’appel doivent faire preuve envers les juges qui ont infligé des peines en ce qui concerne la durée de ces peines. » : R. c. McDonnell, 1997 CanLII 389 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 948, par. 46; R. c. Bisson, 2019 QCCA 2012, par. 8.
[28] Le paragraphe 718.3(7) du Code supprime ce pouvoir discrétionnaire du juge chargé de la détermination de la peine relativement aux infractions sexuelles commises contre des enfants. Il est entré en vigueur le 18 juin 2015 : Loi sur le renforcement des peines pour les prédateurs d’enfants, LC 2015, c. 23, art. 17; Chambre des communes, Débats de la Chambre des communes, 41e lég., 2e sess., vol. 147, n° 234, 18 juin 2015, p. 1620 (Sanction royale).
[29] Je partage la position commune des parties. Au risque de me répéter, je note que le premier représentant du législateur concerné est absent pour défendre la disposition. Son homologue provincial affirme que la peine qui en résulterait pour l’appelant est indéfendable. L’intimée, représentante de l’intérêt public dans les poursuites criminelles, concède sans détour l’inconstitutionnalité de la disposition. Leur positionnement respectif s’accorde avec le droit expliqué par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Nur, 2015 CSC 15 (CanLII), [2015] 1 R.C.S. 773 et notre Cour dans R. c. Bissonnette, 2020 QCCA 1585.
[30] Je propose à la Cour de déclarer l’alinéa 718.3(7)b) du Code criminel invalide et inconstitutionnel, car contraire à l’article 12 de la Charte.