Z.F. c. R., 2024 QCCA 1428

Même si la possibilité d’un préjudice professionnel peut suffire à établir un intérêt véritable à obtenir une absolution, celle-ci ne doit pas être théorique ni simplement hypothétique. Il doit exister un certain fondement au soutien d’une allégation de préjudice professionnel, démontré par une preuve.

[9]         Quant à l’absolution, la juge ne l’exclut pas d’emblée, mais conclut que les conditions pour l’accorder ne sont pas remplies[10].Selon la juge, l’appelante échoue à faire la preuve de son intérêt véritable à être absoute, puisqu’elle ne démontre pas qu’une condamnation lui nuira. Plus précisément, la preuve ne permet pas d’établir : (1) la possibilité d’un préjudice professionnel pour l’appelante et (2) les répercussions négatives d’une condamnation sur son statut de résidente permanente au Canada.

[10]      Sur le premier point, la juge note que l’appelante a commencé des études en soins infirmiers, mais ajoute que l’absence de témoignage à l’audience sur la peine n’étaye pas la possibilité d’un préjudice professionnel découlant de sa condamnation. Cette conclusion est exempte d’erreur révisable en appel. Même si la possibilité d’un préjudice professionnel peut suffire à établir un intérêt véritable à obtenir une absolution[11], celle-ci ne doit pas être théorique ni simplement hypothétique[12]. Il doit exister un certain fondement au soutien d’une allégation de préjudice professionnel[13], démontré par une preuve[14].

L’absolution conditionnelle « ne constitue pas l’unique moyen pour faire échec à une mesure de déportation.

[11]      Quant au deuxième point, le statut de résidente permanente de l’appelante, les parties conviennent qu’une peine d’emprisonnement avec sursis n’entraîne pas les effets potentiellement préjudiciables d’une peine de plus de six mois d’emprisonnement ferme, dont une possible expulsion du pays pour « grande criminalité »[15]. Ainsi, l’absolution conditionnelle « ne constitue pas l’unique moyen pour faire échec à une mesure de déportation »[16]. Cette conclusion est conforme aux enseignements de la Cour suprême dans l’arrêt Tran c. Canada (Sécurité publique et Protection civile)[17], où celle-ci conclut que les peines d’emprisonnement avec sursis ne sont pas visées par le terme « emprisonnement » au sens de l’al. 36(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés[18], dont l’objet est de définir la « grande criminalité » pour les résidents permanents déclarés coupables d’une infraction au Canada[19].

[12]      Par ailleurs, comme le souligne notre Cour dans l’arrêt Diawara c. R., « les conséquences indirectes d’une condamnation en matière d’immigration peuvent être considérées, mais cela ne doit pas faire en sorte que la peine infligée ne soit pas proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant »[20].